De la neutralité et de la colère
Chronique "dimanche" de Chrisophe Bataille, parue dans Libération 27-28 septembre 2008, W-E mon journal, "Littérature notre ciel " p.31. Elle fait référence à la remise en cause de
la mission CIMADE dans les centres de rétention. Nous souscrivons au texte.
Dimanche
Ne vous taisez jamais
Je reçois par courriel un extrait du JO (avec ce slogan angoissant : «Le plus court chemin entre la loi et vous»). Appel d’offre du ministère de l’Immigration, direction de l’immigration. Sous-direction de la lutte contre les fraudes, des contrôles et de l’éloignement. Bureau de la rétention administrative. Appel d’offre clairement destiné àfragmenter les visites des centres de rétention en de nombreux opérateurs. Fini, le travail de la Cimade, dont c’était jusqu’ici la pleine vocation. Fini, le rapport annuel qui fait mal. Fini, les casse-pieds du commentaire. Fini, la honte. Il ya maintenant ces quelques mots : «stricte obligation de neutralité». Autant dire : silence sur lescentres. Silence sur l’efficacité. Les conditions. Les erreurs administratives. Silence sur les oublis. Quelle tristesse quand unedémocratie s’affaisse : quand la peur s’enrobe de raisons, de«comment faire autrement», de «c’est lebien de tous qui nous guide», de «non aux propos irresponsables». Les politiques érigés en adultes m’inquiètent. J’ai tant aimé cet Etat chérissant en son sein uneassociation de mécontents : Soyez en colère! Oui, dites-nous quand vraiment, ça ne va pas… On ne vous suivra pas toujours, peut-être jamais, mais on vous gardera. Et ensemble, nous serons dignes, nous aurons ce dialogue… Beauté du contrôle démocratique. Bien sûr, d’autres feront le travail juridique et humain, mais c’est une certaine idée de ladémocratie que cet appel d’offre met àbas. Alors : nenous taisons jamais.
Dimanche
Ne vous taisez jamais
Je reçois par courriel un extrait du JO (avec ce slogan angoissant : «Le plus court chemin entre la loi et vous»). Appel d’offre du ministère de l’Immigration, direction de l’immigration. Sous-direction de la lutte contre les fraudes, des contrôles et de l’éloignement. Bureau de la rétention administrative. Appel d’offre clairement destiné àfragmenter les visites des centres de rétention en de nombreux opérateurs. Fini, le travail de la Cimade, dont c’était jusqu’ici la pleine vocation. Fini, le rapport annuel qui fait mal. Fini, les casse-pieds du commentaire. Fini, la honte. Il ya maintenant ces quelques mots : «stricte obligation de neutralité». Autant dire : silence sur lescentres. Silence sur l’efficacité. Les conditions. Les erreurs administratives. Silence sur les oublis. Quelle tristesse quand unedémocratie s’affaisse : quand la peur s’enrobe de raisons, de«comment faire autrement», de «c’est lebien de tous qui nous guide», de «non aux propos irresponsables». Les politiques érigés en adultes m’inquiètent. J’ai tant aimé cet Etat chérissant en son sein uneassociation de mécontents : Soyez en colère! Oui, dites-nous quand vraiment, ça ne va pas… On ne vous suivra pas toujours, peut-être jamais, mais on vous gardera. Et ensemble, nous serons dignes, nous aurons ce dialogue… Beauté du contrôle démocratique. Bien sûr, d’autres feront le travail juridique et humain, mais c’est une certaine idée de ladémocratie que cet appel d’offre met àbas. Alors : nenous taisons jamais.
(Neutralité lave les mains plus blanc...)
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